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Tormented Souls : un survival-horror comme on n’en faisait plus

Tormented Souls est un survival horror indépendant, co-développé par Dual Effect et Abstract Digital. Distribué par PQube, le titre est sorti en toute discrétion le 27 août 2021 sur PC, puis sur PS5 le 10 septembre dernier, avec une version physique. Sans plus de détails, nous savons également que le jeu débarquera sur Xbox Series, PS4, Xbox One et même Nintendo Switch, un peu plus tard, nous l’espérons, d’ici la fin de l’année.

Il serait, en effet, bien dommage de priver plus longtemps les joueurs console n’ayant pas (encore) de PlayStation 5 de ce petit bijou horrifique. En effet, si Tormented Soul n’a pas été bruyamment annoncé l’année dernière et n’est pas sorti en grandes pompes cet été, sa place est bel et bien sous le feu des projecteurs, car il mérite toute notre attention.

Caroline Walker, une jeune femme de primes abords on ne peut plus banale, est tranquillement en train de se refaire une beauté lorsqu’on sonne à la porte de son appartement. Ni une ni deux, elle se hâte d’aller ouvrir, mais se retrouve seule sur le palier. En baissant les yeux, elle s’aperçoit qu’une enveloppe a été déposée sur son paillasson. Elle s’en empare et l’ouvre, à l’abri des regards indiscrets. La missive ne contient rien de plus qu’une vieille photo polaroïd représentant deux fillettes qui se ressemblent comme deux gouttes d’eau – sûrement des jumelles -. Au dos, il y est écrit une note des plus troublantes : “Tu crois vraiment pouvoir te permettre de nous abandonner ici ?”. Subitement prise d’une migraine atroce, Caroline a un affreux pressentiment.

Deux semaines ont passé et Caroline ne trouve plus le sommeil. Ses uniques moments de repos sont parasités par d’étranges cauchemars. Ne parvenant pas à effacer l’image des jumelles de son esprit, elle se rend à l’hôpital désaffecté de Wildberger, sur l’île de Blackwood au Canada, d’où provenait la mystérieuse lettre, afin de mener l’enquête. Avide d’une curiosité sans borne, elle entend bien découvrir pourquoi on lui a envoyé cette photographie.

Sur les lieux, la jeune femme n’est apparemment pas seule, puisqu’elle se prend un méchant coup derrière la nuque et perd connaissance. Lorsqu’elle retrouve ses esprits, Caroline est nue dans une baignoire remplie d’un liquide verdâtre, un bandage couvrant son œil droit et un long tuyau relié à une machine d’assistance respiratoire enfoncé au fond de la gorge. Une fois remise de ses émotions et rhabillée, la curiosité la pousse à ôter son bandeau devant le miroir à proximité pour découvrir la partie droite de son visage, qui arbore désormais un orbite vide. Mais qui diable l’a attirée dans un tel traquenard et pour quel motif ?

Depuis sa sortie à la fin de l’été, Tormented Souls a quelque peu fait parler de lui au cœur de la communauté des joueurs amateurs de frissons. Pour autant, le jeu indépendant demeure encore méconnu du grand public. Peut-être parce qu’il s’inscrit dans un genre qui ne s’adresse pas à tous les joueurs, certes. Pour autant, à la Régwaktion, nous aimerions lui accorder une plus grande visibilité avec ce test.

Quelques tâches d’encre qui noircissent le tableau.

Tout d’abord, sachez que Tormented Souls puise ses inspirations dans de très bonnes références en termes de jeux horrifiques des années 90, voire début 2000, notamment du côté de Silent Hill mais surtout de Resident Evil. Le titre emprunte d’ailleurs généreusement à ces jeux phares, pour redonner en quelque sorte un second souffle à ces survival-horror old school comme on n’en fait plus vraiment de nos jours. Si ces mécaniques datées feront plaisir aux adeptes du genre, chatouillant leur nostalgie des bons jeux d’horreur à l’ancienne, elles pourront peut-être déstabiliser plus d’un néophyte.

Si les fans de Resident Evil sont certainement accoutumés aux plans de caméra fixes, il est probable que cela puisse déboussoler les nouveaux joueurs de survival-horror. Quand bien même, la majorité des jeux qui sortent en 2021 ne nous habituent plus à cette caméra-là. Alors, même pour les habitués, certains angles de caméra risquent d’embrouiller votre sens de l’orientation, dans les couloirs les plus complexes ou obscurs. Parfois même, il vous sera difficile de fuir un ennemi. Le plan de caméra changeant en pleine course, vous retournerez dans les bras de votre assaillant, puisque vous n’aurez pas changé de direction. En soi, ce n’est pas vraiment gênant, mais cela peut ralentir votre progression, voire vous désorienter un peu.

Dans Tormented Souls, fort heureusement, l’inventaire n’est pas limité à quelques cases. Celui-ci s’adapte et s’agrandit en fonction des objets que vous accumulez. Aucune gestion de cet espace ne vous est donc demandée. Toutefois, comme dans tout bon survival-horror qui se respecte, il vous faudra faire attention à vos munitions qui, elles, sont restreintes. Prenez donc garde à ne pas les gaspiller inutilement !

Si tant est que l’inventaire est un poids en moins sur les épaules du joueur, la navigation y est plutôt lourde et peu ergonomique. De même, l’utilisation des objets est un tantinet lourdingue, puisqu’il ne suffit pas de sélectionner “utiliser” dans l’onglet des actions possibles ; il faut saisir l’objet souhaité et l’amener à l’aide du joystick ou de la souris sur l’élément du décor avec lequel le faire interagir. Ceci dit, la manipulation des objets est bien faite, rappelant indéniablement Resident Evil.

Un autre bémol qui peut paraître anodin sur le papier, mais qui s’avère un peu frustrant en jeu, c’est la lenteur de notre héroïne. Alors qu’on pousse le joystick normalement, Caroline se met à courir. Mais sa vitesse de course laisse clairement à désirer, car c’est à peine si elle trottine. Ce n’est qu’un détail, me direz-vous. Mais je vous assure qu’au vu des nombreux allers-retours que l’on se retrouve à faire, on désespère de se traîner de la sorte.

Aussi, un point que nous avons trouvé terriblement frustrant, c’est que durant certaines animations scriptées, Caroline n’a aucune frame d’invincibilité. Ainsi, le joueur se fait parfois systématiquement toucher par des projectiles ennemis, à des moments où il ne peut strictement rien faire pour les esquiver.

Ce qui est peut-être le plus perturbant dans Tormented Souls, c’est sa carte. Notez qu’elle a été patchée peu après la sortie du jeu pour être plus lisible, car à l’origine c’était très compliqué de se repérer dessus. Depuis cette mise à jour, nous avons droit à une indication importante qui nous aide à nous localiser : la salle dans laquelle nous nous trouvons est en surbrillance et clignote. En dehors de ce petit détail, la carte ne nous prend pas par la main et il n’est, au début du jeu, pas évident de la maîtriser. D’autant plus qu’un petit défaut de traduction française nous pousse souvent à confondre l’aile Est avec l’aile Ouest, sur certains étages de l’hôpital. Attendez-vous donc à vous perdre de temps en temps !

Sans vous spoiler quoi que ce soit, sachez tout de même que l’affrontement final contre l’unique boss du jeu est plutôt décevant, puisqu’on ne se bat pas véritablement, à proprement parler. Au lieu de cela, il s’agit de répéter la même mécanique de “puzzle” pas du tout original, et même carrément bâteau, pour en finir.

Quant au twist final du récit, il était prévisible de très loin ! Pour vous donner un ordre d’idée, nous l’avons vu venir dès les premières minutes du jeu. La conclusion de l’histoire ne fut donc pas surprenante pour deux sous. Mais si cela peut vous rassurer : Tormented Souls vous prendra au dépourvu à d’autres moments, pour votre plus grand plaisir.

Et pour nos amis chasseurs et chasseuses de trophées/succès, vous serez probablement déçus d’apprendre que vous ne déverrouillerez un succès que si vous obtenez la “meilleure” des trois fins du jeu. Les deux autres ne rapportent aucun trophée, limitant ainsi l’intérêt de recommencer le jeu juste pour une brève cinématique un brin différente.

Une petite pépite imprévue.

Si vous avez entendu parler de Tormented Souls dernièrement, c’est sans doute pour sa difficulté qui a été moult fois pointée du doigt, notamment pour son avarice lorsqu’il s’agit de nous donner des munitions ou des points de sauvegarde, mais aussi pour ses énigmes particulièrement retorses.

Cependant, à la Régwaktion, nous sommes d’avis que cette difficulté est loin d’être un mauvais point. Bien au contraire, nous avons été ravis de découvrir les énigmes bien pensées et globalement vraiment originales du titre. Certaines furent particulièrement délicates à comprendre et à résoudre mais il n’y a là rien de véritablement insurmontable. En tout cas, de notre côté, nous n’avons pas été bloqués au point d’envisager d’abandonner le jeu. Ce fut même amusant de retrouver des casse-têtes de Resident Evil, tels de gros clins d’œil totalement assumés, dans ce Tormented Souls.

Quant au manque de munitions et d’outils de sauvegarde, qui est très souvent ressorti de façon négative, nous ne sommes pas tout à fait d’accord avec cette critique. Il n’y a, en effet, pas beaucoup de salles de sauvegarde. Mais il est de bon ton de rappeler que dans les premiers Resident Evil, de même que dans les anciens Silent Hill, il n’y en avait guère plus. Les munitions, quant à elles, ne sont pas aussi rares que certains le prétendent. Les clous pour la cloueuse se trouvent facilement, un peu partout dans le jeu. De même pour les batteries qui servent à alimenter la matraque électrique ; on en trouve en nombre dans la dernière partie du jeu. Il n’y a guère que les balles de fusil qui se font plus rares. Mais le jeu ne nous oblige pas à tuer chaque ennemi que l’on rencontre. D’autant plus que les créatures ne sont pas bien coriaces. On en vient aisément à bout. Dans la plupart des cas, l’arme de mêlée peut suffire à les abattre, à condition d’esquiver les coups adverses.

Ainsi l’exigence de Tormented Souls, plus légère et plus juste qu’on ne le dit, ne lui fait pas défaut. A l’inverse, c’est un bel atout qui participe à la réussite du jeu.

Techniquement, Tormented Souls est, somme toute, irréprochable. L’ambiance sinistre, morbide et oppressante du jeu est un régal. Les graphismes sont soignés et les décors très détaillés ; sans compter les effets de lumières qui sont vraiment très réussis. Le bestiaire n’est pas très diversifié, mais il y a tout de même quelques catégories de monstres différents ; tous plus ignobles les uns que les autres. Aussi, le level-design est bien fichu, bien qu’on reste plus ou moins dans le même environnement tout au long de l’aventure. La musique n’est, quant à elle, pas spécialement inoubliable. Toutefois, on y reconnaît des airs de Silent Hill, mais encore et toujours, de Resident Evil : surtout dans les salles de sauvegarde ! Décidément, c’est une déclaration d’amour à la franchise de Shinji Mikami.

En bref, on ne peut que constater la maîtrise des deux studios indépendants, qui nous ont concocté un pur jeu d’horreur à l’ancienne.

Oui, Tormented Souls a été fait dans le même moule que les vieux survival-horror. Il en emprunte le style et les mécaniques à divers niveaux. On y retrouve les plans de caméra fixes dont nous avons déjà parlé, une visée automatique des ennemis, ainsi que des énigmes à élucider pour progresser. Il reprend également le concept d’objets à trouver, à manipuler et à combiner, comme ça a été repris à de multiples reprises depuis Resident Evil, par exemple dans Remothered ou encore Song of Horror, pour ne citer que les plus récents. Le système de sauvegarde de l’époque est mis en œuvre dans ce nouveau “vieux” jeu d’horreur. Sauf qu’ici, il n’y pas de machines à écrire à n’utiliser qu’avec des rubans encreurs. Cette fois-ci, nous avons droit à des magnétophones sur lesquels nous pouvons enregistrer notre progression grâce à des bobines qu’il faudra garder précieusement et donc, ne pas utiliser à la légère. Enfin, les armes classiques du survival sont délaissées pour proposer aux joueurs un arsenal bien plus original, composé d’une cloueuse à air comprimé, d’un pied de biche, d’un fusil à fabriquer eux-même et d’une matraque électrique.

Là où nous aurions pu avoir une simple copie de Resident Evil, le jeu nous prouve qu’outre s’inspirer des plus grands, il a aussi son identité propre. C’est d’autant plus flagrant avec son idée d’ajouter à tout cela une mécanique de jeu très intéressante et stimulante : celle des voyages temporels. Mais nous ne vous en dirons pas plus, pour ne pas vous gâcher le plaisir de découvrir ceci par vous-mêmes.

Prenez en compte que, pour une production indépendante, Tormented Souls possède une durée de vie plus que correcte, avec, qui plus est, trois fins disponibles pour une plus large rejouabilité. Mais si vous pensez vous contenter d’une seule fin, comptez environ dix heures pour achever l’aventure.

Un tour de maître

Tormented Souls est un excellent titre, old school et exigeant, qui rend un très bel hommage aux pionniers du Survival Horror. Très justement dosé, il s’avère être un must-have pour tous les friands du genre ! Excepté un scénario relativement classique et un final que nous avions prédit dès les premières minutes du jeu, nous avons adoré vivre cette expérience vidéoludique, que nous ne pouvons que vous recommander chaudement.

Note : 4 / 5

Obtention de la copie : Achetée sur Steam

Editeur/développeur : PQube / Dual Effect & Abstract Digital

Machines : PC et PS5 (Bientôt sur Xbox Series X|S, PS4, Xbox One et Switch)

Prix conseillé : Le prix fort de 19.99€ est tout à fait honnête, pour la version PC. (En revanche, à 34.99€ sur PS5, c’est peut-être un peu cher.)

Metacritic : Le jeu a obtenu le méta-score de 76 sur PC.

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Trish

Je suis Trish, L'impératrice des Rêveurs. J'aime manier les mots, l'arc et le fusil à pompe. Je taille mes critiques d'un revers de plume affûtée. D'un tempérament brut, je tire à balles réelles.

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